Auteur : Vassili Grossman (1905 -1964)
Un incontournable livre d’un immense auteur…
Il s’agit de la deuxième partie d’une grande fresque, d’inspiration tolstoïenne, commencée en 1952 avec « Pour une Juste Cause ». « Vie et Destin » sera achevé en 1962.
Ce dytique débute avec « Pour une Juste Cause » au cours de l’été 1942 chez les Chapochnikov dans leur maison de Stalingrad. Il se termine, dans « Vie et Destin », avec une dernière réunion de la famille Chapochnikov, en avril 1943, dans un Stalingrad en ruines.
Il était bien sûr question de la Bataille de Stalingrad, mais on y trouvait également une critique du régime stalinien. De fait, lorsque le manuscrit de « Vie et Destin » arriva chez l’éditeur, celui-ci l’envoya au KGB. S’en suivit une descente en règle au domicile de Grossman, peu de temps après, d’hommes du KGB qui saisirent les brouillons, tous documents en lien avec l’ouvrage – jusqu’aux rubans de la machine à écrire ! – afin que nul ne puisse un jour reconstituer ce livre… Fort heureusement, Vassili Grossman avait confié des copies de l’ouvrage chez des amis ; malgré tout, dans les années 1970, « Vie et Destin » semblait définitivement perdu.
Sortis d’URSS par Andreï Sakharov (militant pour les droits de l’Homme, Prix Nobel de la paix en 1975), des microfilms contenant des passages du livre – mais non l’intégralité – permettraient une première édition (fut-elle incomplète) dix ans plus tard en Suisse. Ce ne sera qu’avec la Gasnost que le texte intégral sera publié, y compris en Russie, en 1989.
« L’essentiel, c’était que les hommes sont des hommes »…
« Tchekhov a fait entrer dans nos consciences toute la Russie dans son énormité ; des hommes de toutes les classes, de toutes les couches sociales, de tous les âges… Mais ce n’est pas tout ! Il a introduit ces millions de gens en démocrate, comprenez-vous, en démocrate russe. Il a dit, comme personne ne l’a fait avant lui, pas même Tolstoï, il a dit que nous sommes avant tout des êtres humains, comprenez-vous : des êtres humains ! Il a dit que l’essentiel, c’était que les hommes sont des hommes, et qu’ensuite seulement ils sont évêques, russes, boutiquiers, tatares, ouvriers. Vous comprenez ? Les hommes sont bons ou mauvais non en tant que Tatares ou Ukrainiens, ouvriers ou évêques ; les hommes sont égaux parce qu’ils sont des hommes. […] D’Avvakoum à Lénine, notre conception de la liberté et de l’homme a toujours été partisane, fanatique : elle a toujours sacrifié l’homme concret à une conception abstraite de l’homme (*). »
(*) Vie et Destin, éd. L’Âge d’Homme, Lausanne, Le Livre de Poche, 1980, première partie, chapitre 62, pp. 373-374.
Je suis redevable à mon oncle Robert, universitaire, d’avoir un jour porté à ma connaissance l’oeuvre de Vassily Grossman et la trajectoire ce livre en particulier, ainsi que l’histoire qui l’entoure.
Qu’il en soit ici remercié du fond du coeur.
Liens :
• Au sujet de Vie et Destin, voir cette étude très détaillée à ne pas manquer :
http://l-or-des-livres-blog-de-critique-litteraire.over-blog.com/article-35687460.html
• [France Culture] : « Vie et Destin » par Lev Dodine (2014)
Frédérique Leichter-Flack, Maître de conférence habilitée à diriger des recherches à l’université de Nanterre, où elle enseigne la littérature et l’éthique, parle d’un spectacle :Vie et Destin de Vassili Grossman, mis en scène par Lev Dodine.
• [France Culture] : Stalingrad, Treblinka, et sa mère : pourquoi il faut lire Vassili Grossman (2021)
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