14h30.
Et voilà…
Hier à la même heure débutait un événement que je n’oublierai pas. Ma soutenance de thèse. Jusqu’au dernier moment, je n’y croyais pas. Ce moment était arrivé. C’était aujourd’hui… Mais quelle histoire !… Petit retour sur mes premiers pas universitaires :
Il y a quelques années, dans l’école où je me trouvais, était arrivé un message de l’Inspection Académique : conjointement avec l’Université de Provence était mise en place une formation diplômante afin de permettre aux instituteurs qui avaient été recrutés niveau Baccalauréat (c’était le cas pour celles et ceux qui avaient fréquenté feue l’Ecole Normale) d’atteindre la licence – niveau universitaire minimal à cette époque. Je me suis inscrit. C’était en Sciences du langage. Cela me convenait bien.
Chaque mercredi je me retrouvais ainsi à Aix-en-Provence, en compagnie d’une bonne quarantaine d’instituteurs, venus de tout le département, également intéressés par cette formation. Après la Validation d’Acquis et de l’Expérience, nous accédions directement en troisième année de licence. Après plusieurs cours et les examens qui leur correspondaient en janvier et en juin, la licence était acquise. Alors que la plupart des collègues arrêtèrent ici leur retour à l’Université, nous étions cinq ou six à souhaiter poursuivre en Master. Oui, mais quel Master ? En entendant par hasard, au détour d’un couloir, un étudiant parler de sumérien et d’akkadien, je m’approchais et le questionnais : à cette époque existait un Master « Langues et épigraphie du Proche-Orient ancien » (disparu depuis) dont s’occupait Remo MUGNAIONI, enseignant passionné et passionnant.
J’ai pu m’y inscrire. Extraordinaire. Mais attention à l’organisation : plus rien n’était adapté pour les instituteurs, nous devenions des étudiants « lambda ». Avec du recul, il fallait y croire pour partir deux à trois fois par semaine, selon les semestres, rejoindre Aix pour deux à trois heures de cours (après le boulot). Mais les choses suivirent leur cours. Les cours se succédèrent tant bien que mal. Un passage à l’Institut des langues anciennes, à l’Ecole Normale Supérieure de Lyon (dix jours en juillet), me permit de valider deux précieuses matières de M2 qui contribuèrent à boucler le nombre de points nécessaires. Et la soutenance de mémoire eut lieu. Le sujet : « Des sources mésopotamiennes aux papyri d’Eléphantine : traduction et analyse du texte araméen « Histoire et Sagesse d’Ahiqar l’Assyrien » ». Le Master m’a été accordé. Mais alors… L’inscription en doctorat devenait possible ?
C’est sous la direction de Mme François DOUAY, professeur aujourd’hui émérite, ancienne élève de l’Ecole Normale Supérieure, que durant quelques années – il était toujours difficile d’avancer tout en exerçant une activité professionnelle – mes travaux avançaient. Les congés se transformaient en séances de travail et je suivais des séminaires qui avaient lieu chaque mercredi. Il m’aura fallu bien plus de temps qu’un étudiant à plein temps pour y arriver. Ce que je n’aurais jamais pu faire sans la présence de ma directrice de thèse a qui il aura fallu une sacrée dose de patience, j’en ai conscience. Oh que oui !… Je ne la remercierais jamais assez. Toujours est-il que des années après, tout s’accéléra soudain. Il y a deux mois : le bouclage de la thèse et son dépôt à la reprographie. Puis ce fut l’envoi à chacun des six membres du jury. L’attente du verdict des deux pré-rapporteurs allait être décisive. Le premier arriva il y a un mois, très positif : favorable ! L’autre arriva un peu plus tard : favorable également ! Feu vert !
La date de soutenance était fixée au 7 décembre 2013. Au LPL (Laboratoire « Parole et Langage ») à Aix. Mais je ne réalisais toujours pas. C’est lorsque j’ai vu passer, il y a dix jours, un mail de l’Université me concernant intitulé « Avis de soutenance » que les choses changèrent… Là, quand même, la réalité me rattrapait. Ah, oui ! J’oubliais. Le sujet de ma thèse : « « Histoire et Sagesse d’Ahiqar l’Assyrien » ou l’Ummanu sans descendance : Invariance et variations, de l’Antiquité au XVIIIe siècle« .
J’ai passé les derniers jours à finaliser mon exposé d’environ vingt-cinq minutes. Hier, à 14h30, dans la salle de conférences du LPL, la soutenance commençait. Le professeur Philippe CASSUTO, désigné président de séance, présenta les autres membres du jury et me laissa la parole pour la présentation de mes travaux. Vingt-cinq minutes (environ) plus tard, ce fut au tour de ma directrice de Thèse de s’exprimer sur l’ensemble de mon travail, avant de me poser quelques questions.
Ainsi, chaque membre du jury donnait son avis sur ma thèse et terminait avec des questions auxquelles je répondais (avec plus ou moins d’assurance). Après une courte pause, les trois autres membres du jury eurent la parole. En dernier s’exprima, comme le veut la tradition, le Président. Puis (nous venions de passer un peu moins de quatre heures), vers 18h15, il nous fut demandé de quitter la salle afin que le jury puisse délibérer. Ouf ! Déjà je ressentais un beau soulagement. Le plus gros était derrière moi…
Une vingtaine de minutes après, nous regagnâmes nos places. Tout le monde était debout. Le jury y compris. Instant solennel… Le Président annonça qu’à l’unanimité le jury avait décidé de me nommer au grade de Docteur de l’Université d’Aix-Marseille, avec la mention « Très honorable » ! Je ne réalisais pas. Puis il poursuivit en précisant que le LPL avait aboli les Félicitations du jury, sans quoi le jury me les aurait décernées. Je n’en croyais pas mes oreilles. J’avais tellement douté… Puis le jury se mit à applaudir. Je ne savais plus où me mettre… Quel moment ! Je bredouillais quelques mots qui exprimaient pêle-mêle remerciements et soulagement. Sans doute. Je ne m’en souviens plus.
Oui, quel soulagement. Quelle joie. Combien j’avais rêvé de ce moment-là : l’instant d’après. La journée se termina autour d’un sympathique verre de l’amitié qui s’interrompit tout de même au moment où il fallut reconduire les trois membres « extérieurs » du jury à leur train.
Une page se tourne. Depuis les premiers cours en vue d’accéder à la licence à cette soutenance, un cycle s’achève. Et maintenant ? Je dois avant tout réaliser ce qui m’arrive…
Quelle histoire !…
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